Le monde de Drakerys

La légende raconte que Drakerys, notre monde, naquit de la fureur des énergies élémentaires, le Maelstrom, domptée par les dragons primordiaux. Beaucoup d’autres créatures apparurent avec la naissance de ce monde, comme les anges, les démons, les minotaures, les sphinx, etc. Leur puissance, cependant, commença à décliner à mesure que la tourmente magique diminuait.

Quand Drakerys fut achevé, les dragons primitifs et leurs héritiers disparurent, endormis aux quatre coins de ce vaste monde.

Les espèces les plus jeunes étaient moins influencées par les caprices du Maelstrom et ne succombèrent pas à cette léthargie. Libérés du joug impitoyable des créatures anciennes, les nains, les elfes, les humains et les orcs se multiplièrent et partirent à la conquête de Drakerys pour créer les empires que nous connaissons. Dans leurs rangs, quelques rares élus parvinrent à conserver ou à renouer un lien vivace avec la magie. Ils devinrent aventuriers, mystiques ou parias.

Des siècles s’écoulèrent et Drakerys oublia la fureur de ses origines. Chaque espèce donna naissance à plusieurs cultures aux aspirations parfois contraires et tenta de créer une civilisation dominante. Des empires naquirent et disparurent. De temps en temps, des légendes naissaient alors que des héros découvraient les sanctuaires des monstres du Maelstrom. En de rares occasions, certains parvenaient même à vaincre ces créatures affaiblies.

Les choses ont changé il y a quelques mois. Lorn, un célèbre aventurier elfe, cherchait à compléter sa collection de reliques lorsqu’il a pénétré, avec sa troupe, dans le repaire d’une créature bien trop puissante pour lui : Athora. Ce puissant dragon se réveilla de son sommeil et décolla pour mettre le feu au vieux royaume de Xao qui devint, bien malgré lui, le phare annonçant le retour du Maelstrom sur Drakerys.

Depuis cet évènement tragique, le monde change : bouleversements climatiques inexpliqués, phénomènes magiques aléatoires... Les créatures du Maelstrom s’éveillent, parfois avec fracas, parfois en silence. Des armées se lèvent pour accroître leur pouvoir, affronter les monstres ou assouvir d’anciennes vengeances. Une chose est certaine : la magie est de retour alors que Drakerys semble sombrer dans le chaos.

Il y a un peu plus d’un an, Athora attaqua l’île de Kaïku sans explications et, peu après, une tempête élémentaire fit rage à travers l’océan et fit émerger un archipel au-dessus de la mer, révélant des vestiges d’une ancienne civilisation et des trésors primitifs.

Depuis son assaut meurtrier sur l’île de Kaïku, Athora semble s’en être retourné sur les terres égarées, en plein milieu du continent xian. En un an, la situation des xians ne semble guère évoluer : la guerre fait toujours rage, les loyalistes de l’empire doivent toujours faire face à l’avancée des forces d’Athora alors que les premières désertions ont lieu au profit du Dragon.

Et plus nombreux encore sont ceux qui s’entassent sur les maigres terres restantes. Des centaines de réfugiés commencent à prendre des navires pour espérer fuir vers un havre de paix, et se tourne naturellement vers la seule nation majoritairement humaine et bienveillante : l’Empire d’Irosia.

Malheureusement, des mois de malnutrition et de conditions sanitaires déplorables ne jouent pas en leur faveur, et ce sont des populations fatiguées, affaiblies et malades qui arrivent sur le Saint Empire, porteur d’une maladie inconnue qui commence à décimer les populations.

Durant ce temps, les Princes xians peinent à trouver des alliés pour combattre le Dragon alors que toutes les nations tournent leurs regards vers l’archipel des Valgars où de plus en plus de flottes se massent en vue de débarquer et de revendiquer ces nouvelles terres. Le conflit entre Ashral et Irosia semble inéluctable, il ne manquerait plus qu’une étincelle pour que la situation tourne à l’embrasement de tout Drakerys.

C’est dans ce contexte tendu que l’île de Kaïku s’apprête à accueillir la deuxième Célébration du Marcheur après le réveil d’Athora. Les traditions pourraient y être à nouveau bouleversées…

Intro. Opus II

L’odeur de poussière et de cendre emplissait toujours l’île. Wùshen s’était éloigné des lieux de la Célébration, pour la première fois depuis des années. Avec le temps, il avait ce sentiment désagréable qui refusait de le quitter, de cette absence pesante de ce Marcheur qui n’était là que quelques jours dans l’année, pour laisser ses suivants mourir et changer le reste du temps. Il n’avait pas non plus été là quand la Bête avait surgi des cieux et fait pleuvoir le feu sur eux, il n’avait pas été là quand leurs morts s’étaient relevés et avaient commencé à attaquer les vivants. Et à présent, on lui demandait d’aller auprès de tous ces peuples qui se fichaient de leur sort pendant la majeure partie de l’année ?

Il était parti très vite, malgré les dangers de la jungle, il ne voulait pas voir la cérémonie de la crémation, ça rappellerait trop de souvenir douloureux. Alors il était parti, plus loin à l’intérieur des terres, vers les zones rocailleuses de l’île. Il espérait y retrouver Xuéju ; le vieil homme était une de ces forces de la nature, à la carrure impressionnante, de ceux qui ont vécu toute leur vie sans bouger de Kaïku, et qui ont acquis des compétences de survie nécessairement impressionnantes.

Il entendit les chocs, de loin, et eut un instant de frayeur. Y avait-il un combat ? Des étrangers seraient-ils allés agresser l’ermite ? Il se mit à courir, se saisissant juste d’un bâton qui traînait sur le côté. Il arriva près d’un renfoncement dans une paroi rocheuse, et vit que les bruits qu’il avait auparavant entendu venaient de Xuéju, frappant à l’aide d’une large pioche contre le roc.

« J’ai cru qu’on t’agressait ! »

La seule réponse fut un éclat de rire.

« Idiot vas. Tu crois vraiment que quelqu’un voudrait agresser un pauvre bougre comme moi ? »

Wùshen s’appuya contre un rocher, jetant son bâton au loin.

« Qu’est-ce que tu fais ? »

Le vieil homme, toujours souriant, lui montra le trou qu’il avait commencé à faire dans la roche.

« J’ai remarqué un truc. Tu vois, la Bête, quand elle est arrivée, nous on s’y attendait pas. On était comme des braves idiots, à se laisser ballotter... Mais là, il va s’agir d’être plus malin. On pourra pas quitter ce caillou, on y est né, on y a survécu, alors si au-dessus de celui-ci on est en danger, autant aller en dessous. »

Wùshen aurait bien lancé un commentaire sarcastique... Mais non. Le vieil homme avait une sorte de sagesse dans sa folie. Le jeune homme se saisit d’une autre pioche, et commença à l’aider. Ils y passèrent des semaines, l’agitation qu’ils provoquaient attira à eux d’autres natifs, venant chacun apporter de l’aide d’une façon ou d’une autre, sous le regard circonspect des légions irosiennes.

Le nombre des vaillants venus aider augmenta encore lorsqu’un enfant qui s’était perdu raconta avoir erré dans des tunnels. Tous travaillaient maintenant avec ardeur.

Ils y travaillèrent des mois durant, jusqu’à ce qu’un beau jour, un coup de pioche heurta une masse rocheuse étrange. En effet, alors que le coup n’avait pas été plus violent qu’un autre, la pioche s’enfonça jusqu’au manche. Les natifs se rassemblèrent, et virent que la paroi était creuse.

Ils s’affairèrent avec plus d’entrain que jamais, frappant encore et encore, et dégageant une entrée vers ce qui ressemblait à un vaste réseau de grottes.

« Le Marcheur soit loué. »

Les lieux, qui semblaient vides, signifiaient que les habitants allaient enfin pouvoir se sentir à l’abri. Ici, dans les profondeurs de Kaïku, sous la terre qui les avaient vus naître, une nouvelle vie allait commencer.

La pêche (Intro. opus I)

Témoignage à la garde impériale d’un pêcheur, 1er jour du Damidien de l’an 27 du règne d'Alexandre d'Irosia.

Nous étions partis à la nuit pour pêcher dans la baie des brumes, à l’aplomb des falaises de l’île de Kaïku. Quand Hënë et Nyha sont à leur apogée, c’est comme si vous pêchiez au flambeau : les poissons remontent à portée de main, et la mer se met à bouillonner comme un chaudron sur le feu… Il n’y a plus qu’à lancer les filets pour remonter des livres et des livres de marchandise.

L’aube approchait, nous avions fait le plein et nous souhaitions déguerpir avant le lever du soleil. Il aurait été de mauvais goût de se faire prendre par la garnison Xianne à pêcher leur poisson, que nous leur revendrions à prix d’or le lendemain.

Et c’est là qu’elle est venue, l’ombre ailée, gigantesque, aussi grande qu’un de nos temples du culte des Anges. Elle nous a survolés un bref instant, son souffle menaçant de nous faire chavirer, se dirigeant vers l’intérieur des terres.

Puis il y eut les flammes, les hurlements suivis d’une immense colonne de fumée… En un instant, c’était terminé, le silence était revenu. Nous n’entendions plus que le choc sourd du ressac contre les falaises. J’ai donné les consignes pour affaler les voiles en urgence, et nous avons mis la barre vers nos terres pour vous avertir.

Je ne sais pas ce qu’il est advenu des habitants de l’île, même le plus brave de mes gars refuse de s’en approcher tant qu’une de nos légions n’y aura pas fait le ménage. L’île de Kaïku avait plutôt mauvaise réputation en dehors des Célébrations du Marcheur, mais j’ai bien peur que ça n’aille pas en s’arrangeant...